Païolive, l’envers du décor

L'association Paiolive nous ayant sollicités pour faire l'inventaire des micromammifères du bois de Paiolive nous sommes venus prospecter sur le terrain en mars et avril 2010.

Nous connaissions cette région pour avoir passé de formidables vacances dans les environs il y a 40 ans et c'était pour nous une joie de revenir dans ce pays si particulier qui a séduit des milliers de générations humaines par son climat, ses paysages de falaises, de rocailles et de belles rivières riches en faune sauvage. À vrai dire, si nous avons retrouvé la chaleur et la jovialité des habitants du cru et la qualité de certains paysages, il nous faut bien reconnaître que nous avons été surpris et déçus par l'emprise des inconvénients du tourisme incontrôlé et la banalisation de la société de consommation.

Sur le bord des routes, nous n'avons jamais vu autant de panneaux publicitaires en infraction. Cela va du loueur de quads qui s'affiche illégalement sur  tous les poteaux téléphoniques en bois du secteur à l'entreprise publicitaire qui installe, en infraction, des panneaux à louer, hors agglomération, dans des communes de moins de 10 000 habitants.

Il est consternant de voir certains  abords des villages envahis par des zones artisanales et commerciales qui gaspillent les meilleurs espaces agricoles, uniquement accessibles en voitures et camions et décorées de panneaux publicitaires géants, de dépôts de matériaux en tous genres, sans arbres et sans cachet. Comme dans les pires banlieues urbaines.

Une des méthodes utilisées pour rechercher les micromammifères consiste à trouver des bouteilles jetées dans la nature. En effet les mulots, les musaraignes et souris s'enfilent par le goulot en poussant avec les pattes de derrière et ne peuvent en ressortir car ils glissent à l'intérieur. Ils y meurent de faim, de froid ou de chaud. Inutile de vous dire combien il est aisé de faire cette prospection en Ardèche du Sud. Vous vous arrêtez n'importe où en bordure de route et vous pouvez trouver des dizaines de bouteilles parmi des kilos de déchets. En huit jours de terrain nous avons trouvé 22 bouteilles contenant des micromammifères Sans compter celles qui contiennent des lézards, des escargots ou des insectes morts, nous avons trouvé 15 mulots sylvestres, 27 musaraignes musettes (avec un record de 9 individus dans une même bouteille), 1 souris domestique et 3 souris à queue courte.

 

Ce sont des dizaines de bouteilles que nous avons apportées aux containers de recyclage dont nous connaissons maintenant parfaitement les divers emplacements dans la région. A vrai dire les aires de repos sont d'une saleté repoussante et on trouve des épaves, des caravanes en ruine, des dépôts sauvages un peu partout, même dans les endroits les plus reculés. Nous avons pris une photo d'un dolmen orné d'un reste de cuvette de WC et le site de la Grange aux pères sur Lablachère, où les fentes du lapiaz sont remplies de déchets, est un vrai scandale.

 

Si ce pays veut continuer à vivre du tourisme, il parait urgent de changer tout cela. Le tourisme mal compris, mal contrôlé, est en train de corrompre ce qui faisait son charme et son attrait. Il serait formidable de lancer une grande opération de nettoyage et de restauration pour que cet ancien  paradis ne devienne pas un pauvre tiers-monde pollué et banalisé.

 

Jean-François Noblet

 

 

Nous remercions Jean-François Noblet d'avoir attiré notre attention sur le problème de l'affichage illégal de publicités hors agglomération. Bien que sensibles à la nature et aux paysages, l'habitude avait endormi notre sens critique sur ce point.  Ce problème fait pourtant partie intégrante de notre responsabilité et ce nouveau chantier sera prioritaire à la rentrée (NDLR)
Tags : Païolive

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